Depuis l’avènement du bouillant nouveau Premier Ministre, on consomme du ‘Johnson’ le matin, du ‘brexit’ à midi et du ‘Backstop’, un pilier du brexit le soir.
Nous savons qui est Boris Johnson. Il est le tout nouveau locataire de l’adresse la plus prisée du Royaume et dont sur la célèbre porte noire est gravé le chiffre 10. Il est surtout le leader qui s’est donné pour mission de réussir là où Theresa May a failli: retirer son pays de l’Union européenne le 30 octobre, contre vents et marées. Nous savons aussi vaguement ce que veut dire Brexit. En peu de mots, il s’agit de la sortie du Royaume Uni de l’Union Européenne. En revanche le backstop, véritable épine dorsale du Brexit se veut un peu plus complexe. Nous allons tenter de démêler cet écheveau pour le bien de notre lectorat qui nous en a fait la demande. C’est quoi donc ce backstop qui donne des insomnies aux politiciens ?
Historique
Il y a quatre-vingt-dix ans, l’Irlande s’était divisée en deux après une guerre contre ses colons britanniques. Le sud devint un État à part, aujourd’hui appelé République d’Irlande. Mais cette rupture entraîna des décennies d’agitations et de violence en Irlande du Nord restée fidèle à la couronne. En effet les nationalistes catholiques souhaitaient que l’Irlande du Nord rejoigne la république d’Irlande alors que les protestants ne partageaient pas cet avis. Cette opposition entre catholiques (républicains et nationalistes) et protestants (loyalistes et unionistes) sur l’avenir de leur pays entraîna plusieurs décennies de conflit d’une rare violence avec pour corollaire plus de 4000 morts.
Le 10 avril 1998, sous les auspices de Tony Blair, un accord appelé « Good Friday Agreement » est signé, mettant fin au conflit sanguinaire entre frères. Depuis lors une paix relative souffle sur l’Irlande et les deux factions ont cessé de se regarder en chiens de faïence. C’est dans ce climat d’ accalmie que David Cameron, qui venait de gagner un nouveau mandat décide de but en blanc d’organiser un referendum sur le retrait ou non de son pays de l’Europe. Les Britanniques avec une majorité de 52 % optent pour la porte de sortie, meme si en filigrane, les Irlandais et les Ecossais ont voté pour rester. Cette décision est lourde de conséquences et risque de réveiller les vieux démons de la division et fragiliser voire mettre en péril le “Good Friday Agreement” acquis de haute lutte. Comment contrôler la traversée de frontière (500km) entre les deux pays?
Backstop
Le « backstop », ou « filet de sécurité » est une ‘’clause temporaire de sauvegarde’’ pour garder la frontière ouverte aux biens et aux personnes entre le Royaume Uni et la république d’Irlande, en attendant que Londres et Bruxelles trouvent un compromis quant à leur futur rapport. C’est une sorte de police d’assurance entre les deux entités visant à éviter toute frontière physique entre l’Irlande du Nord et l’Eire. C’est en fait la solution que propose le négociateur en chef de la Commission Michel Barnier à cette problématique irlandaise qui a déjà valu leurs scalps à David Cameron et Theresa May.
Boris Johnson alias ‘’do or die’’ a annoncé les couleurs. Le Backstop, il n’en veut pas. Mieux il compte sortir son pays de ‘’l’imbroglio européen dans 90j, le 30 octobre, ‘by any means necessary’, avec ou sans accord. Leo Varadkar, Premier Ministre irlandais s’est lui aussi voulu ferme. Dans une sorte de réponse du berger à la bergère il a indiqué que ‘’le reste des 27 Etats membres étaient “unis” dans leur position selon laquelle l’accord de retrait conclu en novembre dernier ne saurait être réouvert’’. En d’autres termes l’Europe reste campée sur sa décision : plus de négociations pour un nouveau deal. Deux positions plutôt antinomiques.
Les nuages s’amoncellent au dessus des rapports entre le Royaume Uni et l’Union Européenne d’une part et la classe politique politique britannique qui n’a jamais été aussi divisée depuis que le “rassembleur” Boris a déposé ses valises à 10 Downing Street d’autre part.
Isaac Tchankap